Yves GANTOU est l'auteur de Le temps des ambitions de l'Aveyron (Editions Toute Latitude 2022) et A la recherche de l'identité de l'Aveyron (Editions Toute Latitude 2021), deux ouvrages de référence sur notre département.
Aurélien DELBOUIS l'a longuement reçu en interview pour Midi-Libre, nous vous proposons ce passionnant échange en intégralité :
"À peine le temps d’écouler son précédent opus, que revoilà l’Aveyronnais de Saint-Jean-du-Bruel Yves GANTOU - qui vit désormais entre la Normandie et Paris après avoir passé une partie de sa vie à Marseille - qui nous revient avec Le temps des ambitions de l’Aveyron, recueil de 309 pages, préfacé par Arnaud VIALA, qui relate comment le département « poussiéreux » jusqu’au milieu du XXe siècle est devenu aujourd’hui moderne et attractif. L’un de ceux où l’on vivrait le mieux.
C'est l'histoire d'une transformation de l’Aveyron - pour ne pas dire d'une révolution - qu’Yves GANTOU nous présente aujourd'hui, entre révolution agricole et agroalimentaire, renaissance industrielle et artisanale, mutations sociales et urbaines. Le tout sans oublier l’émergence de leaders investis, de précurseurs imprégnés et de « champions » économiques et industriels de dimensions nationale et internationale qui symbolisent à eux seuls cette ambition aveyronnaise.
Après l'identité aveyronnaise, vous vous intéressez aujourd’hui à son ambition. Vaste sujet. Comment vous est venue l’envie de travailler cette matière Aveyron sous le prisme économique cette fois ?
Disons qu’en travaillant sur mon premier livre, j’ai été frappé de constater comment cette société aveyronnaise, traditionnelle, paysanne - que l’on peut résumer par la célèbre citation de l’abbé Bessou, « la foi, le patois et les paysans sont trois qui ne font qu’un » -, va exploser dans le courant des années soixante. Après la révolution agricole, l’évolution a été phénoménale, presque invraisemblable. Je pense que les Aveyronnais n'ont pas intégré, qu’à compter de cette date, ils ont changé de planète.
C’est-à-dire ?
En 1950, la situation n’a quasiment pas changé depuis le XIXe siècle. Et soudain, brusquement à partir des années soixante, les choses s'accélèrent. En trente ans, le département connaîtra des mutations de grande ampleur, ce qui fait dire au géographe ruthénois Henri Enjalbert que le Rouergue « encore stagnant et sommeillant parfois jusqu’à la léthargie en 1950, aura été plus profondément changé en un quart de siècle que sur le demi-millénaire antérieur. » C’est pourquoi, j’ai voulu étudier ce processus qui nous amène aujourd’hui dans le XXIe siècle.
Un changement d'ampleur qui touche finalement tous les secteurs.
C’est vrai. La modernité, le développement, les changements concernent bien des secteurs. Le premier changement, c'est celui de l'agriculture. Cet ancien département pauvre, dont l’activité agricole était orientée vers la polyculture extensive, à base de céréales panifiables avec de faibles rendements, va devenir un pays d’élevage. Un pari stratégique, assez fou, que l’on doit à des personnalités telles que Marcel Bruel, Raymond Lacombe ou André Valadier. Je parle aussi des leaders syndicalistes de la Jeunesse agricole catholique, la JAC, qui a tant fait pour opérer ce changement qui fait qu’aujourd’hui, l’agriculture en Aveyron représente 10 % de population active pour un chiffre d’affaires d’1 milliard d'euros, dont 90 % sont générés par la production animale. C'est phénoménal !
Vous insistez aussi sur le volet industriel, très sous-estimé selon vous ?
C'est sans doute trop peu connu, mais l’Aveyron est un département industriel avec 14 % d’actifs dans ce secteur quand la moyenne régionale est simplement de 11. Le département occupe donc une place importante sur le plan industriel. En rajoutant le secteur de la construction, on atteint 20 000 salariés. Je parle aussi de la ‘Mecanic Vallée’, ce petit eldorado industriel devenu leader de l'aéronautique. Que dire enfin de l’artisanat - l'Aveyron est une 'Terre d'artisans' -, du tourisme ou du volet énergétique. Avec ses centrales hydroélectriques, ses éoliennes et parcs photovoltaïques, l’Aveyron produit plus de 12 % de l’énergie électrique en France. C’est énorme.
Ce département « poussiéreux » pour certains, longtemps moqué pour son enclavement, est donc en pointe dans bien des domaines ?
C’est le cas. Et cette révolution a été particulièrement rapide. Qui aurait pu dire dans les années quatre-vingt que nous en serions là aujourd’hui ? Personne ! Cette modernité est bien là, visible avec une amélioration des conditions de vie, la modernisation des établissements de santé, le progrès matériel, la transformation des routes, des logements... Tout ça était inespéré. Quant à l’enclavement, je pense que quand l'homme est confronté à une nature difficile, il est obligé de se surpasser. Ce qui a été le cas des Aveyronnais en France et à l’étranger.
Vous évoquez enfin les défis futurs que devra relever l’Aveyron. À commencer par sa démographie dont vous soulevez le « paradoxe ». Qu'en est-il ?
La menace pour l’Aveyron tient effectivement dans sa démographie, vieillissante. Le département peine à attirer et à retenir. Il y avait 318 000 habitants au début du XIXᵉ siècle. 415 000 en 1886 avec derrière, le rôle de l'Église qui poussait à une forte natalité. Nous sommes descendus au plus bas en 1999 à 264 000 habitants avec pour objectif le cap de 300 000 habitants. Or, si la chute de la population s'est interrompue depuis 1999, elle ne doit pas masquer les énormes faiblesses et disparités d'un territoire à un autre. L'Aveyron est un département âgé dans lequel près d'un Aveyronnais sur trois est à la retraite. A contrario, la tranche des 15-29 ans qui représentait 17,5% de la population française en 2018, atteignait les 13,8% dans le département. Sachant qu'on prévoit le doublement des personnes âgées de plus de 85 ans d'ici 2040, la prise en charge de la dépendance sera sans doute pour l'Aveyron le principal enjeu des années à venir.
Le temps des ambitions de l'Aveyron, de Yves GANTOU
Préface d'Arnaud VIALA, Président du Conseil départemental de l'Aveyron
Avant-propos de Dominique COSTES, Président de la Chambre de Commerce et d'Industrie et de Jacques MOLIERES, Président de la Chambre d'Agriculture de l'Aveyron
Format : 15x22 cm - 320 pages - 22 Euros TTC
ISBN : 978-2-35282-067-3 - Diffusion CED / Distribution Dod&Cie
Disponible en librairies et par correspondance.
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